SOMMAIRE
RÉSUMÉRÉSUMÉ
Les côtes du Cotentin sont occupées par une vaste population de delphinidés, appartenant à l'espèce Tursiops truncatus. Un suivi de la population est engagé depuis cinq ans, il utilise la technique de la photo-identification. Pendant l'été 1998, on a cherché à développer une nouvelle approche basée sur l'étude des communications sonores. Cet aspect de la biologie des delphinidés et surtout de Tursiops truncatus a largement été étudié en captivité, en comparaison l'effort sur les populations sauvages est beaucoup moins important. Au Portugal, une étude acoustique est menée sur des populations sauvages, je me suis donc appuyé sur les travaux de Dos Santos pour orienter ma démarche.
Les conditions d'enregistrement en mer ont tout de suite été favorables, le bruit ambiant est suffisamment faible pour ne pas masquer les émissions acoustique de dauphin et ces derniers sont suffisamment loquaces pour que l'échantillonnage des sons soit suffisant. Une série d'enregistrements sont réalisés sur une population de plus de vingt individus, sur la côte est du Cotentin dans la baie de St Vaast. L'analyse des enregistrements se fait sur PC, avec un logiciel de traitement des sons. J'ai pu isoler toutes les catégories de sons observés dans d'autre population, c'est-à-dire les clicks, les cris pulsés et les sifflements. En quantité, les sifflements constituaient plus de 90 % des émissions acoustiques, le choix à donc été de travailler spécifiquement sur ces signaux. 10 sifflements différents sont analysés et caractérisés par leur durée, l'intervalle de fréquence, leur redondance et leur association avec d'autres signaux. En moyenne, les sifflements se trouvent dans un intervalle de fréquence de 7 à 16 kHz, pour des durées moyennes de 0.4 à 1.4 secondes. Plusieurs signaux ne sont pas analysés du fait de leur rareté dans les enregistrements.
Au regard des résultats obtenus et des conditions dans lesquels nous avons réalisé les échantillonnages, il apparaît que le projet d'étude acoustique se justifie largement. Sa réalisation est facilitée par un ensemble de propriétés lié au territoire occupé par les dauphins et aux mœurs de ces derniers. De plus l'acoustique pourrait être utilisée aussi bien dans le cadre d'une étude des communications acoustiques que dans les méthodes de suivi des groupes (signature acoustique et repérage par écoute passive).
REMERCIEMENTS
Avant tout, je tiens à remercier celui qui m'a fait confiance, Gérard Mauger, président de l'association. Il m'a offert l'opportunité de travailler sur ce projet de bioacoustique et m'a permis de découvrir à la fois le monde des dauphins et de la mer.
Anne Tardieu, Samuel Pineau et l'intarissable Eric Buchet membres de l'équipe du G.E.C.C., ont tenu une place importante durant la réalisation de mon stage. Je les remercie pour leur sympathie, leur aide et le fait de m'avoir accepté durant 3 mois auprès d'eux.
Enfin, j'ai pu bénéficier au début de mon travail des conseils de Christophe Guinet, chercheur au CNRS de Chizé.
INTRODUCTION
Dans le département de la Manche, plus précisément sur les côtes du Cotentin, un certain nombre de dauphins appartenant à l'espèce Tursiops truncatus ont été suivi et identifié depuis 5 années.
Maintenant que l'on est capable, dans une certaine mesure, de reconnaître chaque individu, il devient intéressant de développer un autre type d'approche basé sur l'enregistrement des émissions sonores des troupeaux de dauphins.
De nombreuses recherches sont menées et ont été menées dans cette voie, dont l'essentiel s'est fait sur des animaux captifs. Elles ont permis de développer des méthodes d'analyse et de classification des signaux, et ont tenté de trouver une signification.
A la lumière de ces travaux on a mis en place un programme de travail en acoustique dans la Cotentin. Les objectifs sont très simples dans un premier temps :
CHAPITRE I
p
ropriétés de l'acoustique sous-marineUn son ou signal acoustique, est une vibration des particules du support matériel dans lequel il se propage. Cette vibration est due à des ondes de pression qui se propagent dans le milieu. Une source sonore est à l'origine de l'ébranlement des particules, celle-ci peut-être un élément vibrant, pulsant ou un écoulement gazeux.
Cette onde de pression se déplace à la vitesse de 300 m.s-1 dans l'air et de 1500 m.s-1 en moyenne dans l'eau de mer, à température ambiante. On définit la fréquence f de vibration, comme étant le nombre de cycle par unité de temps. On note l, la longueur d'onde, qui correspond à la distance entre les maximums et minimums de pressions successifs.
Enfin, on distingue deux grandes catégories de sons :
Généralement on décrit une onde sonore par 3 paramètres : sa fréquence, son intensité et sa durée, on ajoute parfois le timbre, qui permet de discriminer des sons très proche d'un point de vue de la structure.
La fréquence du mouvement vibratoire d'un signal caractérise un son, on parle de la hauteur du son. On parle de haute fréquence quand la vibration est très rapide : c'est un son aigu, on parle de basse fréquence, quand la vibration est lente : c'est un son grave.
Il est à noter que les basses fréquences peuvent se propager sur de longues distances, beaucoup plus que les hautes fréquences. Cela est dû à l'énergie supérieure des sons émis en basses fréquences. Les sons en basses fréquences sont donc utilisés dans les communications à longue distance.
Schéma 1 : Spectre sonore |
Les ondes transportent de l'énergie. L'intensité d'un son correspond au flux d 'énergie sonore par unité de temps et par unité de surface, traversée par le flux. On l'exprime généralement en dB (unité relative exprimée par rapport à une unité de référence). Cette intensité va alors dépendre de l'amplitude de vibration des ondes sonores : en effet une forte amplitude nécessite le déplacement d'une grande quantité de matière (milieu de propagation), de ce fait il faut beaucoup d'énergie. Cette qualité du son se désigne plus couramment sous les termes "son fort" ou "son faible".
Généralement l'émission d'un son s'accompagne d'une résonance, celle-ci dépend fortement de l'appareil vocal de l'individu. Cette particularité est la base de ce qui différencie un même son produit par deux individus différents : c'est le timbre.
Cette résonance se superpose au son de base (le son pur) et constitue ce que l'on désigne sous le terme d'harmonique, c'est-à-dire une vibration secondaire. Cette harmonique (il peut y en avoir plusieurs) correspond à un multiple entier du son pur (donc de fréquence plus élevée). On remarque que généralement dans les sons biologiques, cette harmonique n'est pas parfaite puisqu’elle ne correspond pas forcément au multiple du son pur.
Selon les 3 paramètres décrits ci-dessus, il existe plusieurs représentations d'un phénomène sonore :
Les sons se propagent beaucoup plus vite en milieu aquatique, toutefois les particularités physico-chimiques de ce milieu, et surtout en mer, peuvent modifier de façon non homogène la circulation des sons. D'autre part, on remarque que lorsque l'on s'éloigne de la source sonore, l'intensité perçue par l'observateur diminue. Une perte d'énergie semble donc résulter de la distance à la source. Deux phénomènes entrent en jeu : la divergence de l'onde sonore et l'amortissement par absorption.
De manière générale, la vitesse de propagation d'un son pourra varier d'un point à un autre sous l'influence : 1) de la température, 2) de la salinité et 3) de la pression. Ces paramètres interviennent de manière simultanée, c'est-à-dire que la vitesse en un point sera la résultante de ces trois facteurs (Fig. 1).
Figure 1 : un exemple de variation de la vitesse du son en fonction de la profondeur dans l'atlantique. |
A partir de la source, les ondes circulent en rayonnant. Plus on s'éloigne de la source plus le rayon de l'onde sera important, l'énergie de celle-ci va donc forcément décroître. Par cette divergence géométrique des ondes sphériques, l'énergie va diminuer avec le carré de la distance.
On verra dans la suite que le dauphin à la possibilité d’émettre de manière directionnelle. Mais dans ce cas, la perte d'énergie de l'onde sonore suit la même loi que pour une émission omnidirectionnelle.
Dans tout milieu physique, air ou eau, les ondes sonores perdent de l'énergie dans leur propagation : l'onde est amortie. Ce phénomène est dû aux frictions entre particules, à l'absorption et à la diffusion de l'énergie. De manière générale on considère que l'énergie diminue exponentiellement avec la distance.
Figure 2 : Absorption de l'énergie acoustique à différentes fréquences dans de l'eau de mer pour une température et une pression particulière. On met en évidence les effets cumulés de la relaxation du sulfate de magnésium et de l'acide borique |
Ce dernier phénomène contribue également à la perte d'énergie de l'onde sonore. Celle-ci dans son parcours va heurter les particules en suspension, telles que le zooplancton, le phytoplancton ou les bulles d'air (suite à un orage par exemple). On parle alors de diffusion. Ce premier type de réverbération est variable avec la profondeur, avec les propriétés biologiques du milieu (richesse organique) et avec l'état de la mer (agitation météorologique, propreté du milieu : surcharge en particules inorganiques). De manière pratique, on observe directement ce phénomène sur au niveau de la qualité de réceptions des sonars de pêche.
Enfin, il existe d'autres formes de réverbérations qui sont liées aux types de fond (roche, sable, vase) et à ll'état de la surface de la mer (force du vent, rasance du vent ) .
On désigne ici l'ensemble des bruits naturels de la mer, provoqués par les organismes, les vagues, les vents, le roulement des débris sur les fonds, les écoulements sous-marins. À cela s'ajoute le bruit propre, dû aux systèmes d'écoutes : appareil, vagues contre le bateau, bruit de moteur.
Ces bruits sont gênants dans la mesure où ils peuvent diminuer la lisibilité sonore des enregistrements et masquer des émissions de dauphins lors d'écoutes passives.
Si l’on porte plus attention à ces bruits, on remarque que les bruits ambiants de pleine mer ne sont en définitifs pas gênant, uniquement si cela correspond à la somme de bruits tous indépendant et de même ordre de grandeur. Dans ce cas le bruit se cantonne dans une plage de basse fréquence et de faible intensité. L’analyse d’enregistrement est possible si les émissions de dauphins ne sont pas de trop faible intensité.
La situation se complique à proximité des côtes, différentes sources sonores apparaissent et le bruit ne se répartissant plus de façon isotrope comme en pleine mer, les intensités sont plus élevées. Celles-ci peuvent complètement masquer les émissions des dauphins. De manière générale on constate sur le terrain une augmentation audible du bruit ambiant, mais tout en conservant une bonne lisibilité auditive des phénomènes acoustiques biologiques. Toutefois, les écoutes sont perturbées occasionnellement par le trafic maritime. Il faut préciser ici que ces conditions d’écoutes à proximité des côtes, sont particulières bonnes sur le littoral du Cotentin.
La figure suivante, issue des travaux de G. M. WENTZ (1962), nous donne un aperçue de l’intensité et du spectre de fréquence de différents bruit sous-marin.
CHAPITRE II
B
iologie et Bases physiologiques de la communicationTursiops truncatus (Montagu 1821), grand dauphin, dauphin souffleur ou encore dauphin à gros nez, faisant référence à la forme particulière de son rostre assez court. Les Anglo-saxons utilise d'ailleurs un terme évocateur pour définir cette espèce : "bottlenose dolphin".
La plupart des zoologistes et des taxonomistes sont unanimes pour ne reconnaître qu'une seule espèce. Certains admettent aussi l'existence de variétés géographiques (morphologie, taille et pigmentation différentes) dont trois peuvent donner naissance à des sous espèces, à savoir :
C'est un animal massif, les mâles plus grand que les femelles peuvent atteindre 3 à 3,5 m pour un poids de 150 à 250 kg. Le melon (partie antérieure de la tête) est épais et convexe (sa forme se modifie par contraction lors des communications). Le rostre est cylindrique et proportionnellement court (il mesure 1/21 de la longueur corporelle). Les dents sont pointues, toutes identiques, relativement larges et petites. L'aileron dorsal est médian, assez haut et falciforme, son extrémité est souvent pointue. Les nageoires pectorales sont falciformes.
En règle générale, la pigmentation corporelle varie de gris moyen à gris très sombre sur la face dorsale, gris clair sur les flancs et blanc parfois rosé sur la face ventrale.
Ce qu'il faut noter essentiellement au niveau de la tête du dauphin est le télescopage des os. Cette disposition particulière a profondément modifié la forme des os et l'aspect général de la tête. Cela résulte de l'allongement du rostre, du recouvrement du frontal et des pariétaux par les prémaxillaires et les maxillaires
(Schéma 2).
Schéma 2 : Profil gauche et vue inférieure du crâne sans la mandibule. md : mandibule ; mx : maxillaire ; Pmx : prémaxillaire ; fr : frontal ; So : Supra-occipital ; Pa : pariétal ; te : temporal ; Exo : Exo-occipital |
Même si les causes de cette modification ne sont pas déterminées, on se rend compte que certaines propriétés de l'anatomie de la tête sont impliquées dans les relations acoustiques de l'animal avec son environnement
(Cf. IIB).Les contraintes liées au mode de vie des ces animaux nous donnent qu'une idée limitée de leur activité et des leurs comportements. Les observations comportementales se font à la faveur d'activités de surface, et sont spécifique à des ces instants ; les activités aériennes sont liées à la respiration, au jeu (sauts hors de l'eau) et à certaines activités sociales. Le dauphin peut rester en immersion de 7 à 10 minutes en moyennes et son rythme de respiration varie selon l'activité et le stress (bateau).
Lorsqu'il nage calmement, le rostre, le melon et le dos apparaissent au-dessus de la surface et durant les déplacements rapides, il "marsouine" et peut sauter entièrement hors de l'eau.
Ce cétacé est grégaire, il évolue généralement dans des groupes comptant au moins une vingtaine d'individus. Toutefois, il peut être rencontré en pleine mer évoluant dans un troupeau de plusieurs centaines d'animaux.
Les animaux côtiers se nourrissent d'une grande variété d'espèces de poissons et de céphalopodes. Ils utilisent généralement les 4 ou 5 espèces - proies les plus abondantes localement. Ce sont principalement des poissons vivant en bancs et fréquentant les fonds, tels que les mulets, les maquereaux, les anguilles et les raies.
Il est difficile d'estimer les besoins en poissons des individus sauvages, cependant les consommations en captivité nous donnent une idée de l'échelle de cette estimation. En général, les individus consomment 3 à 6% de leur masse corporelle, et il faut noter que les besoins sont variables selon la température des eaux. En masse de poisson, dans les aquariums, un dauphin adulte consomme de 6 à 20 kg de poisson dans la journée.
Le genre Tursiops est assez cosmopolite, on le trouve aussi bien dans les eaux tropicales que dans les eaux tempérées, son aire de répartition n'atteint pourtant pas les eaux polaires et se limite globalement à 45° de latitude pour les deux Hémisphères. Les populations de Tursiops sont à la fois pélagiques et côtières, avec des variations selon les zones : il semble qu'il soit plus côtier dans les eaux tropicales, et indifférent dans les eaux tempérées. Enfin, on constate que les populations côtières ont une densité plus élevée par rapport aux populations pélagiques.
Il y a eu de nombreuses spéculations sur les mécanismes de production de son chez les dauphins. Evans (1973) expliquait que la plupart des hypothèses étaient insuffisantes pour justifier la production de sons complexes de ces animaux.
Une première hypothèse, la plus courante, est proposée par Norris et Cranford. Elle concerne surtout les odontocètes mais peut s'étendre aux cétacés en général. Pour ces auteurs les sons seraient produits au niveau des sacs péri-nasaux, situés dans le conduit respiratoire entre le crâne et l'évent. L'air en provenance du larynx serait comprimé par différents muscles et replis membraneux qui joueraient le rôle de valve.
Les ultrasons seraient produits sous l'évent au niveau de diverticules du conduit nasal, le melon tiendrait le rôle de lentille acoustique pour propager les ultrasons dans l'eau. Ce mécanisme est envisageable car l'impédance des structures mises en jeu est égale à l'impédance de l'eau. La réception des ultrasons, après réflexion sur les obstacles, serait perçue par la mandibule puis transmise vers les organes de l'audition (Os pétrotympanique, oreille moyenne et oreille interne).
Il est intéressant de noter qu'un cordon graisseux est inclus dans la mandibule, sa nature chimique est similaire à celle du melon. Les propriétés de conduction de ces graisses amènent à parler de "tissus acoustiques".
Pour ces auteurs les sons auraient la même origine que celle des autres mammifères, c'est-à-dire le larynx. Cette hypothèse a pu se confirmer par la découverte de structures similaires aux cordes vocales des autres mammifères (REINDENBERG et al., 1987, 1988, 1994). Le pharynx est entouré de muscles puissants qui vont transmettre ses vibrations aux os du rostre, du vomer et des maxillaires. La vibration serait enfin transmise à l'extrémité du rostre de manière unidirectionnelle.
Photo 1 : Vue générale du larynx, les flèches indiquent les cordes vocales. |
Les travaux sur ces structures tentent maintenant de vérifier si elles peuvent vibrer dans les registres nécessaires à la production de sons, aux fréquences et aux rythmes utilisés par les cétacés.
En détaillant l'hypothèse de Norris et Cranford, on trouve un certain nombre de points contradictoires (réfringence insuffisante du melon, la structure n'est pas présente chez tous les cétacés). Des expériences menées sur des animaux vivants ont tout de même prouvé que les structures décrites par ces auteurs intervenaient de façon difficilement contestable dans le processus de production des sons.
D'après certains auteurs comme Tomilin (1968), la taille importante du cerveau des dauphins est simplement une adaptation à la vie aquatique. Ce qui serait lié à la structure du système auditif, généralement massive et notamment plus importante dans le cerveau des odontocètes que dans celui des mysticètes (BREATHNACH, 1960). Mais le sujet n'est pas résolu, et l'on peut observer des mammifères totalement adaptés au milieu aquatique, qui n'ont pourtant pas développé un tel cerveau.
Les terminaisons nerveuses du système auditif dans le cortex cérébral sont importantes, et plusieurs auteurs travaillant sur le système nerveux du dauphin, suggèrent que le développement du cortex cérébral soit attribué à l’acoustique (WOOD and EVANS, 1980).
Comme chez les autres mammifères, les sons sont réceptionnés au niveau du pavillon auditif, et mettent en vibration l'os Pétrotympanique, qui transmet l'influx nerveux vers le cerveau. Le point clef dans l'audition des cétacés réside dans les problèmes d'impédance acoustique. Les tissus du dauphin ont une impédance proche de celle de l'eau, par conséquent les sons et échos (ultrasons) traverse l'animal. Pour que l'animal puisse repérer l'origine des sons, les oreilles sont isolées acoustiquement l'une de l'autre. De même pour que celui-ci puisse coordonner ses émissions, il est important qu'il n'existe pas de lien sonore direct entre l'émetteur et le récepteur. On constate donc que les structures de production de sons sont isolées acoustiquement du reste de la tête par des sinus remplis de mucus.
Tandis que l'homme ne peut percevoir des sons aux fréquences supérieures à 20 kHz, les dauphins ont une sensibilité auditive largement supérieure. Le grand dauphin présente une sensibilité aux hautes fréquences à hauteur de 150 kHz, avec une meilleure sensibilité entre 40 et 100 kHz (JOHNSON, 1966).
Ce terme désigne des émissions acoustiques très particulières, qui ont été étudié dans les années 1950. Entre 1930 et 1940, des données sont déjà collectées à ce sujet sur des colonies de dauphin captif (Tursiops truncatus) au Marine Studios en Floride, et on soupçonnait alors des possibilités d’écholocation ou de sonar chez ces animaux.
Des études plus poussées, menées entre autres par Kellogg en 1958, Norris en 1961, Evans et Powell en 1967 ont montré que des dauphins privés de la vision étaient capables de faire de très fin discernement sur des objets sous-marin, à des distances supérieures à 100 m, et cela en employant des trains de clicks à hautes fréquences émis par la partie nasal et dirigé vers l’avant.
CHAPITRE III
D
escription et analyse du siteLa population de dauphin étudiée se trouve dans le Nord de la France, au large des côtes du département de la Manche. Durant l'été 1998, le groupe de dauphin à évoluer dans la baie de seine, au large du port de St-Vaast-La-Hougue, c'est-à-dire sur la côte est du Cotentin.
Carte 1 & 2 :
Situation géographique de la zone d'étudeIl se situe sur la façade est du Cotentin, entre Carentan et St-Vaast-La-Hougue. Cette zone est située au nord du delta de Carentan (
Tableau I), formé par le Vire et la Douve. C'est une position remarquable pour trois raisons :
Sites |
Surface du bassin versant (km²) |
Débit moyen annuel total (m3/s) |
Cours d 'eaux principaux |
Baie des Veys |
3857 |
38,3 |
Vire et Douve |
Tableau I :
source IFREMERSaint-Vaast-La-Hougue est un port de pêche et de plaisance. Le nombre de plaisancier fluctue en fonction de la saison (
Tableau II) et atteint son maximum pendant la période estivale. La baie de St Vaast présente un intérêt touristique pour ses îles, comme St Marcouf, et pour la tranquillité de ses eaux ; le port est aussi le point de départ pour les bateaux qui tentent le passage, difficile, au nord vers la pointe de Barfleur.
Données sites |
Site |
Région |
Fret (tonnage) |
- |
68 353 224 |
Nombre de passager par an |
- |
4 306 571 |
Pêche : tonnage débarqué |
25 364 |
82 236 |
Plaisance |
||
- nombre d 'anneaux en ports organisés |
1202 |
8 636 |
- nombres de mouillages communaux et échouages |
250 |
1 673 |
- nombre de mouillages forains |
- |
- |
Tableau II :
source IFREMEREn ce qui concerne la pêche professionnelle dans la baie, on rencontre essentiellement des navires de chalutage qui travaillent dans la baie ou en pleine mer. Il y a également de nombreux pêcheurs utilisant la ligne à plusieurs hameçons. Ces professionnels suivent les bancs de poissons et évoluent indifféremment dans la baie et en pleine mer.
Photo 2 : Bateau de pêche du port de Diélette.C'est le type de bateau le plus fréquent rencontré dans les zones d'étude. A proximité ils masquent les émissions de dauphins, mais généralement ils passent loin et ne sont pas présents longtemps sur le site de travail. Le nombre de bateau en mer est faible et ne constitue pas une gêne dans le travail. |
Les relations entre les pêcheurs et les dauphins sont liées aux activités de pêche, les techniques utilisées dans la baie ne vont pas dans le sens d'une concurrence et l'on constate auprès des professionnels de la pêche que la présence de ces animaux n'est pas ressentie comme une gêne.
Photo 3: Vue aérienne, à marée basse, du port et des parcs (au centre) de St-Vaast-La-Hougue. Photo prise lors d'un vol de suivi des populations de dauphin. |
La conchyliculture est une activité prédominante à St-Vaast-La-Hougue (
Photo 2). La production de moule et d'huître couvre près de 45 % de la production totale régionale (Tableau III).Il n'y a pas de pression écologique de cette activité sur les dauphins, elle peut même constituer un avantage dans la capture de certaines proies évoluant à proximité des parcs.
Données sites |
Site |
Région |
Production biologique annuelle (tonnes) |
||
- moules |
1 000 |
12 000 |
- huîtres |
16 000 |
26 000 |
Nombres de colis commercialisés (de 5 à 10 Kg) |
||
- moules |
74 700 |
630 000 |
- huîtres |
535 900 |
1 483 000 |
- autres coquillages |
280 000 |
1 265 800 |
- pêche |
345 600 |
953 000 |
Aquaculture |
- |
- |
Tableau III :
source IFREMERLa façade est du Cotentin n'accueille pas les structures lourdes de l'ouest, c'est-à-dire l'usine de retraitement des déchets nucléaire de La Hague et la Centrale Electrique Nucléaire de Dielette. De nombreuses communes sont réparties sur les côtes de la façade est du Cotentin, et le nombre de rejet n'est proportionnellement pas trop élevé (
Tableau IV). L'analyse de la qualité des eaux (station de Carentan et de Saint-Vaast-La-Hougue), faite sur la concentration en contaminant dans les huîtres et les moules du littoral, donne en moyenne une très bonne qualité (IFREMER - RNO).
Assainissement |
Site |
Région |
Capacités de traitement des communes (eq. Hab) |
13 350 |
974 578 |
Nombre de rejets directs à la mer (épurés ou non) |
||
- urbains |
3 |
35 |
- industriel |
5 |
35 |
Tableau IV :
source IFREMER
CHAPITRE IV
C
omportement acoustique du grand dauphinLes vocalisations des odontocètes sont particulièrement variées selon les espèces. On note également une grande richesse du répertoire sonore de chaque espèce. Depuis plusieurs décennies et encore actuellement, cet aspect de la biologie des delphinidés est sujet à de nombreuses recherches, visant à mesurer, à comprendre et à inventorier le potentiel acoustique de ces animaux.
Le biotope et les moeurs des cétacés sont un obstacle aux efforts de recherche sur leur biologie, et leur comportement en milieu naturel. Les activités de surface sont les seules données aisément accessibles aux observateurs ; hors cela représente une petite fraction de la vie des ces animaux.
L'acoustique s'est révélée être un caractère dominant chez ces espèces, qui plus est facilement échantillonnable à partir de la surface. Les propriétés de propagation du son dans l'eau donnent accès à des groupes éloignés du point d'observation acoustique. Nous disposons alors d'un moyen d'observation qui par corrélation peut nous renseigner sur les mœurs des dauphins.
Dans ce chapitre sont présenter quelques-uns des signaux acoustiques utilisés par l'un des groupes de grand dauphin (Tursiops truncatus) vivant le long des côtes du Cotentin.
Aucune étude acoustique n'a auparavant été faite sur ce groupe et sur l'ensemble des autres grands dauphin des côtes normandes. Cette étude acoustique visera donc à poser les premières bases d'un inventaire des signaux et de détailler les méthodes de travail.
Les enregistrements ont été réalisés en majorité à bord de bateaux placés à proximités des dauphins. Toutefois nous avons tenté des enregistrements à partir des terres.
Le matériel d'étude acoustique se compose :
Photo 4 :
NAGRA IV
Photo 5 : Ensemble du matériel acoustique utilisé durant la campagne d’enregistrement de l’été 1998. Les caractéristiques techniques sont détaillées dans l'annexe n°3. A : enregistreur nagra iv ; B : alimentation ; C : hydrophone et câble renforcé de 50m. |
La première étape a consister à réaliser des "écoutes passives ", c'est une écoute directe du bruit sous-marin, sans enregistrer (quelques bruits parasites accompagne généralement le fonctionnement du nagra). Ceci m'a permis de me familiariser avec le bruit ambiant de la zone de travail, j'ai pu ensuite discerner les sons biologiques des sons mécaniques ou naturels (j'entends par-là le bruit du sable, des cailloux qui roulent sur le fond et celui des vagues par exemple).
Une fois que l'on a dans "la tête" le son émis par les dauphins, il devient plus facile de déclencher les enregistrements au moment où les dauphins émettent. Cela évite d'accumuler des heures de bandes inutiles.
Dans un premier temps la démarche était basée sur l'enregistrement systématique des événements acoustiques, identifiés comme étant émis par des Tursiops t.. C'est une méthode d'échantillonnage rapide de sons qui me permettaient :
L'examen des bandes sons a été effectué directement à partir des enregistrements originaux. Le NAGRA est connecté avec l'ordinateur est transmet au logiciel SBRTA un signal numérique, converti via l’interface audio de l'ordinateur. Par ce système, le signal traité par le logiciel était le plus correct, on minimisait de cette manière la perdition de qualité engendrée par les conversions successives du signal (analogique -> numérique).
Comme il a été précisé dans le chapitre III, les caractéristiques acoustiques des côtes normandes sont telles, qu'il n'a pas été nécessaire d'utiliser un filtre pour analyser les signaux. De plus pour la majorité des signaux, leurs basses fréquences ne se trouvaient pas dans la bande de fréquence du bruit ambiant ; certains auteur (TAN & TAYLOR) ont avancé à ce sujet que le grand dauphin était capable d'adapter le spectre de ses vocalisations aux bruits de l'environnement. Cette faculté a toutefois été observée uniquement en milieu artificiel et dans des conditions de captivité, rien ne nous permet d'affirmer cela en milieu naturel même si les faits vont dans le sens de l'hypothèse.
Les signaux acoustiques sont définis et classés à partir de leurs propriétés structurelles sur sonagrammes. L'analyse temporelle et fréquentielle a été faite avec le logiciel SBRTA.
C'est un problème qui se fait surtout ressentir pour les sifflements (whistles), qui est un signal présentant une grande diversité dans le répertoire des delphinidés. Les anciennes méthodes de détermination des similitudes entre sifflements ont plusieurs limitations. Dans la plupart des études, les similitudes de contours des sifflements sont évaluées subjectivement par les spécialistes à partir d'analyses visuelles de spectrogrammes.
Cette méthode ne constitue certainement pas un moyen fiable dans l'élaboration de catégories de sifflements, car elle se base sur des traits non spécifiés qui ne peuvent pas être utilisés pour développer une méthode quantitative standardisée de description des types de sifflements. A partir de là des problèmes de comparaison s’imposent lorsque l'on veut étudier parallèlement les signaux acoustiques de populations différentes (DOS SANTOS 1995).
Plusieurs auteurs proposent de nouvelles méthodes d’analyses et de classification des sifflements. Récemment des méthodes quantitatives se développent pour comparer les contours de signaux de plusieurs espèces (SYMMES et al. 1979 ; MARDINADLE 1980 ; CLARK 1982 ; CHABOT 1988 ; NOWICKI & NELSON 1990 ; BUCK & TYACK 1993), aucunes de ces méthodes n'est encore standardisée et leur mise en place est encore complexe du point de vue du matériel et des algorithmes d'analyses.
En rapport avec des travaux réalisé au Portugal (Estuaire de Sado) et en Australie (Moreton Bay) (Ong [8], dos santos []), il semble que dans un premier temps une description par les paramètres suivant soit la plus efficace (mis en évidence par des tests non-paramétriques comparant les sons des populations d’Australie et du Portugal) :
Les émissions sonores des delphinidés (et les cétacés en général) peuvent être globalement divisées en formes pulsées et non pulsées (continues). Les formes pulsées se subdivisent en deux sous-groupes d'après leur utilisation : écholocation et fonction sociale. Les formes continues, appelées également sifflements ou whistles pour les anglo-saxons, sont typiquement des sons non modulées ou modulées ayant un rôle sociale.
Les trois grandes classes de signaux qui sont décrites ci-dessous se basent sur des différences très nettes de structure (son purs, harmoniques). Toutefois il faut noter que dans chacune de ces classes il nécessaire d’établir de nouvelles classifications, mais celles-ci ne sont pas encore standardisées.
Il s'agit de brèves impulsions sonores typiquement émises en série, généralement employées comme signaux d'écholocation chez les Odontocètes (NORRIS 1966). L'écholocation n'est pas réellement un moyen de communication entre les cétacés, il est utilisé comme sonar et permet à l'animal d'appréhender son environnement. En Manche, on peut détecter très souvent ce type de signal, notamment au moment des chasses collectives, où les dauphins localisent leurs proies grâce à l'écholocation.
Spectrogramme 1 : train de clicks (NORRIS, 1966), enregistrés en Baie de Seine pendant l’été 1998. x-temps : 256ms ; y-fréquence : 2 kHz |
Les clicks ont été décrit et étudier par de nombreux auteurs, qui ont analyser la durée, la répétition et la bande passante. Les clicks des dauphins sont indifféremment observer en milieu naturel et en captivité, toutefois on constate qu'en captivité l'utilisation des clicks est moins soutenue du fait de la clarté de l'eau.
Ce type de son est décrit de manière très pittoresque dans la littérature anglo-saxonne, on rencontre des termes désignant la sonorité que rappelle ce son, c'est tout autant de terme comme "quawks", "moans", "blats", groans". Au sein du répertoire des dauphins, il semble que ces signaux est un rôle social.
La structure fréquentielle est complexe, elle se compose d'harmoniques qui peuvent être modulées ou non.
Les recherches sur les communications vocales chez le grand dauphin et les autres delphinidés ont centré leurs efforts sur les sifflements pour des raisons très pragmatiques. Le spectre sonore des sifflements est facilement enregistrable et analysable ; ces sifflements sont notamment émis par la plupart des animaux captifs et semble n'avoir aucune autre fonction que celle de la communication. Si bien que certains auteurs avancent que le sifflement constitue le niveau primaire du mode de communication, une hypothèse qui n'a pas encore été vérifiée.
Il faut remarquer qu'un large nombre d'espèces de cétacés n'utilisent pas le sifflement
(annexe n°2), les sons pulsés s'imposent donc comme signal de communication. Pour les espèces utilisant les sifflements, les sons pulsés peuvent alors apparaître comme un enrichissement du répertoire de communication.D'un point de vue structurel, les sifflements sont des sons purs ou quasiment purs. Ils sont typiquement non modulés ou modulés, et émis dans l'intervalle 5 – 15 kHz en moyenne. La durée typique est comprise entre 0.5 et 2 secondes. Ces signaux peuvent sont émis à répétition pendant un certain temps, comme ils peuvent être émis partiellement.
Spectrogramme 3 : deux sifflements successifs enregistrés pendant l’été 1998 en Baie de Seine. x-temps : 256ms ; y-fréquence : 2 kHz. |
Plusieurs groupes de dauphins ont été identifiés le long des côtes normandes, à l'ouest et à l'est du Cotentin. Lorsque l'étude acoustique a débuté, un groupe d'une trentaine de dauphins (Tursiops truncatus) s'est manifesté sur la côte est du Cotentin et présentait des spécificités intéressantes pour débuter l'étude acoustique dans des conditions idéales :
Le groupe était constitué de plus d'une vingtaine d'individu, et semblait avoir de nombreux jeunes protégés par les femelles et quelques mâles. Les travaux de photo-identification permettront d'identifier les individus de ce groupe.
A plusieurs reprise, pendant les campagnes d'enregistrement, les dauphins étaient en pleine pêche collective (à proximité du port de St Vaast-La-Hougue). A cette occasion nous avons pu réaliser des enregistrements de clicks, typique des activités d'écholocation (localisation des poissons) (NORRIS, 1966). Ceux-ci sont caractérisés sur nos enregistrements par :
Spectrogramme 4 : Clicks enregistrés pendant l’été 1998, groupe de dauphin de la baie de St Vaast-La-Hougue. x-temps : 256 ms ; y-fréquence : 2 kHz |
Nous avons pu identifier un second type de click, qui se caractérise par sa régularité dans la fréquence d'émission des clicks.
L'intervalle entre chaque click varie faiblement entre 0.05 et 0.07 s. Nos échantillons présentent un intervalle prépondérant de 77 ms. D'autre part, ces clicks sont émis régulièrement sans les variations observées sur les clicks précédents.
On sait que ces trains de clicks ne sont pas émis lors d'une pêche collective (très visuelle à bord d'un bateau), toutefois on est incapable de préciser l'activité de l'animal qui a émis ces clicks, on ne peut donc qu'émettre des hypothèses sur la signification biologique de ce signal. D'après différents auteurs il se pourrait que ce type de click serve de signal de maintien d’un contact acoustique entre les individus.
Spectrogramme 5 : Clicks enregistrés pendant l'été 1998, groupe de dauphin de la baie de St Vaast-La-Hougue. x-temps : 256 ms ; y-fréquence : 2 kHz |
Remarque :
Nous avons eu l'occasion de réaliser des écoutes passives nocturnes, à proximité d'un groupe de dauphin. L'activité acoustique était quasiment nulle, mis à part de courtes émissions de clicks à intervalle régulier de 3 à 4 min. Nous n'avons pas analyser la structure de ces signaux, mais ces observation peuvent nous renseigner sur le rôle sociale de ce type de signaux. Parfois une composition sonore particulière a été identifiée, associant des clicks et des sifflements qui se superposent. Il semblerait que cette situation soit caractéristique des jeunes dauphins d'un an, qui développent leur système de production de son (Tan & Taylor [7] – en captivité). Or le groupe étudié se composait de femelles et de jeunes en majorité.
Cris : Enregistré pendant l’été 1998, groupe de dauphin de la baie de St Vaast-La-Hougue. x-temps : 256 ms ; y-fréquence : 2 kHz |
Plusieurs auteurs abordent le sujet des dialectes, c'est-à-dire des cris très stéréotypés et appartenant au répertoire d'un groupe de dauphin. Ces dialectes permettent d'identifier un groupe par une analyse acoustique. Dans le groupe étudié nous avons isolé plusieurs cris stéréotypés, caractérisés par :
Avec les enregistrements dont on dispose, il n'est pas encore possible de parler d'un dialecte, pour cela il faudrait un effort d'enregistrement plus intense sur le groupe de dauphin étudié afin d'identifier avec certitude les cris utilisés par ce groupe. Ensuite il faudrait comparer ces cris avec ceux d'autre population de dauphin (Méditerranée par exemple) et avec les autres groupes de dauphin normands.
Pour clarifier l'inventaire qui va suivre j'ai personnellement utilisé une dénomination simple, basé sur un index alphabétique. Ce classement ne correspond pas à un référentiel national ou même international. Je tiens à préciser que d'autres auteurs (Anglo-saxons ou Espagnols) utilisent généralement pour identifier les signaux, des adjectifs évoquant la sonorité acoustique des émissions, mais ce système à tendance à renforcer la subjectivité du classement qui n’est déjà pas basé sur des traits particulièrement objectifs.
Dans les caractéristiques reportées pour chaque signal, une d'elle correspond à la redondance, c'est-à-dire le nombre de fois où le signal a été isolé sur les enregistrements. A coté de cette valeur est signalée entre parenthèse le nombre effectif de signaux utilisé pour établir les caractéristiques (#X).
Sifflement de Type a
Signal a : Enregistré pendant l’été 1998, groupe de dauphin de la baie de St Vaast-La-Hougue. x-temps : 256 ms ; y-fréquence : 2 kHz |
Il s'agit d'un sifflement relativement complexe, en rapport avec les autres sifflements enregistrés. Ce signal dépasse en durée la seconde, et son amplitude moyenne couvre une grande partie du spectre sonore audible par l'homme. A l'oreille, ce signal est très facilement identifiable :
En général ce signal est enregistré dans un contexte d'émissions acoustique importante, c'est-à-dire avec au moins 2 à 3 signaux émis en même temps ou immédiatement après.
On constate une certaine variabilité dans la structure fréquentielle du signal. L'aspect très caractéristique de ce signal au sein du répertoire des dauphins fait que l'on rassemble facilement ces signaux ensemble.
Sifflement de Type b
Signal b : Enregistré pendant l’été 1998, groupe de dauphin de la baie de St Vaast-La-Hougue. x-temps : 256 ms ; y-fréquence : 2 kHz |
Ce sont les deux seuls sonagrammes représentant ce type de signal qui ont été enregistré. Leur structure en cloche sert de critère de classement.
L'émission de ces signaux ne s'est accompagnée d'aucun autre signal, et ils ont été émis successivement à moins de 250 ms d'intervalle. Le très faible nombre d'échantillon enregistré pour ce type de signaux ne permet pas de rendre ces informations très significatives encore.
Sifflement de Type c
Signal c : Enregistré pendant l’été 1998, groupe de dauphin de la baie de St Vaast-La-Hougue. x-temps : 256 ms ; y-fréquence : 2 kHz |
La structure de ce signal est très simple et fait partie de ces types de signaux dont la structure consiste en une décroissance fréquentielle à pente constante. Il occupe en général la partie centrale du spectre audible. C'est un signal fréquent et très court.
Le contexte d'émission de ce signal est très variable, il est émis de manière isolée ou inclus dans des trains de sifflements, ces derniers sont d'ailleurs constitués soit du même type de sifflement soit de sifflement varié.
Une certaine variabilité affecte ce signal et touche les basses fréquences du sifflement :
Sifflement de Type d
Signal d : Enregistré pendant l'été 1998, groupe de dauphin de la baie de St Vaast-La-Hougue.x-temps : 256 ms ; y-fréquence : 2 kHz |
On distingue ce signal du précédent par l'existence de trois variations dans la pente de décroissance de la fréquence. Les caractéristiques fréquentielles et temporelles les rapprochent énormément.
Ce signal est émis dans tous les cas, au sein d'un train de sifflement supérieur à 2 signaux. L'intervalle entre chaque signal varie entre 0.5 et 1 seconde. Les sifflements accompagnant l'émission sont tous simple et en diminution de fréquence.
Ce signal présente une variabilité dans sa structure fréquentielle ; le maximum d'énergies est toujours dans le même intervalle de fréquence, en revanche les extrémités en basses et hautes fréquences sont variables, ainsi que la durée du signal par l'intermédiaire d'un changement de pente).
b |
Sifflement de Type e
Signal e : Enregistré pendant l’été 1998, groupe de dauphin de la baie de St Vaast-la-Hougue.x-temps : 256 ms ; y-fréquence : 2 kHz |
C'est un sifflement très caractéristique par sa structure fréquentielle, qui a été peu rencontré dans les émissions acoustiques du groupe de dauphin étudié.
Les deux signaux sont inclus dans un train de sifflements (3 sifflements différents), où chaque signal est séparé du précédent par un intervalle d'environ 500 ms.
Visuellement, aucune variation signicative de la structure fréquentielle n'est observée sur les échantillons.
Sifflement de Type f
Signal f : Enregistré pendant l'été 1998, groupe de dauphin de la baie de St Vaast-La-Hougue.x-temps : 256 ms ; y-fréquence : 2 kHz |
Le spectre de fréquence couvert par ce signal est assez étroit, et on constate que l'énergie du signal est importante sur la quasi-totalité de l'émission.
Les deux signaux ont été enregistrés successivement dans un même train de sifflement. Aucun indice ne nous permet de préciser si ces signaux sont émis par un même individu ou par plusieurs.
Il n'y a pas de variabilité significative au niveau de la structure fréquentielle du signal. Il faut noter que l'on ne dispose que de 2 échantillons, ce qui est largement insuffisant pour conclure sur les propriétés de ce signal.
Sifflement de Type g
Signal g : Enregistré pendant l'été 1998, groupe de dauphin de la baie de St Vaast-La-Hougue. x-temps : 256 ms ; y-fréquence : 2 kHz |
Structure particulièrement simple, caractérisée par une augmentation constante de la fréquence du signal. L'énergie sur signal est surtout concentrée au début et diminue progressivement. La bande de fréquence couverte par le sifflement est assez importante, de l'ordre de 8 kHz. L'importante redondance de ce signal dans le répertoire sonore des dauphins le caractérise parmi les autres signaux, il semblerait donc que ce sifflement est un rôle prédominant dans la communication entre les individus du groupe.
Il est toujours inclus dans un train de sifflement, de composition simple (même signaux) ou complexe (plusieurs signaux de types différents et se superposant).
La structure fréquentielle ne change pas, mais le contour est soumis à des modifications locales de pente ainsi qu'à des modifications dans l'amplitude et la durée du signal.
Sifflement de Type h
Signal h : Enregistré pendant l'été 1998, groupe de dauphin de la baie de St Vaast-La-Hougue.x-temps : 256 ms ; y-fréquence : 2 kHz |
Ce signal occupe la bande de fréquence supérieure à 8 kHz et peu atteindre 18 kHz. Le sifflement est de structure simple, c’est-à-dire une augmentation de fréquence à taux constant. On remarquera comme caractéristique du signal une inflexion à la base du signal.
Le signal n'est pas émis de manière isolée, mais ne semble pas faire partie d'un train de sifflement.
Variabilité : la structure fréquentielle des signaux enregistrés ne présente pas de variabilité, cependant on peut observer une modification dans la durée du signal.
Sifflement de Type i
Signal i : Enregistré pendant l'été 1998, groupe de dauphin de la baie de St Vaast-La-Hougue. x-temps : 256 ms ; y-fréquence : 2 kHz |
Sifflement aisément identifiable qui se caractérise par une variation brusque de la séquence fréquentielle. Il est relativement puissant car l'intensité est forte sur presque toute la durée du signal.
Deux des 4 signaux sont émis ensemble à 0.5 secondes d'intervalle ; les autres sont en revanche émis indifféremment seul ou avec d'autres signaux.
Il n’y a pas de variabilité significative de la structure fréquentielle et temporelle.
De nombreux signaux, ne figurant pas dans la classification précédente, font partie des émissions du groupe de dauphin étudié. Comme les autres, ils sont émis de manière isolée ou complexée avec d'autres signaux : sifflements, cris.
Ils sont délibérément négligés pour deux raisons : 1) ils sont présent une seule fois sur les enregistrements, ce qui est insuffisant pour déterminer leur contour et leurs caractéristiques ; 2) la lisibilité du signal est trop sur le sonagramme.
Cependant il est nécessaire de signaler leur présence dans les émissions sonores enregistrées durant la campagne de 1998, leur rareté peut-être due à un biais dans le protocole de collecte des données acoustique. En effet nos habitudes d'enregistrements (sites, horaires, approche) et la période de travail (saison estivale) nous auraient peut-être privés de l'opportunité de rencontrer certaines situations sociales chez le dauphin, qui s'accompagne de ces signaux.
Afin de signaler quels types de signaux nous avons rencontres, et de pouvoir les étudier ultérieurement, les plus lisibles sont rassemblés sur la planche 1.
Les tableaux synthétiques suivant concernent uniquement les cris et les sifflements, indices acoustiques réellement utiles pour identifier et étudier les groupes de dauphin.
Les clicks sont négligés dans le traitement statistique des données, ces émissions sonores ayant uniquement un rôle d'écholocation ou de cohésion du groupe. Ils n’ont pas un sens social propre au groupe et donc utilisable pour l'identifier ou l'étudier.
Proportion par rapport au nombre de signaux enregistrés |
Variabilité des émissions |
|
Signaux identifiés |
84 % |
10 |
Signaux non classés |
16 % |
8 |
Nombre de signaux analysables |
91 |
|
Référence |
Proportion |
Référence |
Proportion |
a |
6 % |
g |
12 % |
b |
2 % |
h |
7 % |
c |
22 % |
i |
4 % |
d |
11 % |
j |
8 % |
e |
4 % |
cris |
5 % |
f |
2 % |
||
Finalement la bande de fréquence du niveau de bruit le plus élevé (0 et 4 kHz) ne se trouve pas dans celle où l'émission des dauphins est la plus importante. Et la majorité de l'énergie de leurs communications et de l'écholocation se situe à de plus haute fréquence.
Toutefois les sons produits par les poissons sont plus localisés dans la bande de fréquence du bruit issu du trafic maritime (pêche et tourisme) (FERREIRA, 1996). Le bruit ambiant peut donc ne pas être un stress pour les dauphins, mais il peut être suffisant dans certain cas pour masquer les sons des poissons, ce qui peut réduire les possibilités de capture lorsque les dauphins pêchent par écoute passive (Ambiant Noise Imaging – ANI) (TAYLOR, 1997).
Comme il a été préciser dans le chapitre III, la position géographique de la baie de Saint Vaast en fait une zone abritée des perturbations arrivant par l'ouest. Au vue des rigueurs climatiques de cette région, et surtout durant la période hivernale, il est intéressant de pouvoir disposer d'un site d'étude navigable en dehors de la période estivale.
L'effet d'abris dans cette baie présente deux type d'avantage pour l'échantillonnage des sons : 1) des conditions de sortie favorables plus fréquente, par rapport à l'ouest Cotentin, Soumis directement au vent violent d'ouest ; 2) une agitation et un vent plus faible qui optimise la qualité des enregistrements.
La forme de la baie, plus ou moins encaissé présente un avantage de chasse pour les dauphins. Ils utiliseront préférentiellement cette zone pour rabattre les bancs vers le nord. C'est donc une zone de forte probabilité de rencontre avec les groupes de dauphin, lorsque les bancs de poissons sont présents dans la baie (mulets, maquereaux).
Ce logiciel a été conçu spécifiquement pour l'analyse des vocalisations de cétacés. C'est une première version et toutes les options de configuration et d'analyses ne sont pas encore disponibles. La version 1.0 autorise tout de même la majorité de fonctions d'affichages des sons et d'analyse de ces derniers. La fréquence d'analyse maximale est de 19293.75 Hz, ce qui permet de couvrir une partie non négligeable des émissions sonores des dauphins.
L'avantage de SRBTA est de pouvoir "sample" directement (à partir du nagra) ou indirectement (à partir d'un enregistrement sur cd) les sons. L'analyse fréquentielle, temporelles et d'intensité ne sont toutefois pas estimées par un algorithme spécifique, il s'agit seulement d'une analyse à partir de l'image spectrographique. C'est toutefois suffisant pour un inventaire et l'identification des clicks et des sifflements.
Ce logiciel ne permet cependant pas l'analyse de l'amplitude en fonction du temps : oscillogramme. Cette analyse permet dans certain cas une analyse plus fine, que ne peut nous fournir le spectrogramme (faible intensité, lisibilité du spectrogramme).
CHAPITRE V
D
eveloppement de la bioacoustique Dans le cadre du suivi des populations de dauphinLe comportement de la majorité des animaux s'organise suivant des rythmes diurnes et saisonniers, les communications associées varient donc elles aussi selon certains rythmes. Cette approche du comportement est peu décrite chez les cétacés, et généralement elle se limite aux périodes estivales et automnales.
La plupart des auteurs s'entendent pour utiliser les mêmes catégories comportementales décrivant les activités principales du grand dauphin (Shane 1990) :
Chacune de ces catégories est identifiable par une série de comportement spécifique en surface (Müller, 1998 [11]) qui permettent à priori de déterminer le comportement l'activité de l'animal à l'instant de l’observation. Il faut noter que certains critères de surfaces varient parfois selon les auteurs.
Les efforts de recherche du groupe de dauphin lors de la campagne d'enregistrement d'été, nous ont amené à esquisser un rythme d'activité. Nous pouvions assister à l'arriver des dauphins dans la baie le matin, aux comportements sociaux (jeux, accouplements), aux chasses et éventuellement aux départ des dauphins hors de la baie. Leur comportement était donc rythmé suivant un rythme journalier.
Ce type de comportement est globalement similaire de ceux décrit dans des études beaucoup plus précises réalisées en Afrique du Sud par Saayman et al. (1973) et sur les côtes texanes par Bräger (1993) : le matin on observe surtout un comportement de chasse qui diminue durant la journée ; les activités sociales augmentent dans l'après-midi avec les déplacements ; le soir les déplacements occupent la majorité des activités.
Ces rythmes ne sont pas généralisables à toutes les populations de dauphin, des différences nettes s'observent par exemple en Floride (SHANE, 1990a) ou en Argentine (WÜRSIG et WÜRSIG, 1979). D'après ces auteurs, les modifications de répartition des activités journalières semblaient être influencées, par la température de l'eau ou la richesse en proie.
Un environnement sonore caractéristique accompagne les activités des dauphins : clicks d'écholocation pour la chasse, cris et sifflements pour les activités sociales, clicks de cohésion durant le repos (obs. personnelles) et faibles émissions durant les déplacements.
L'acoustique peut être un outil d'observation sonore, permettant d'identifier les activités principales des individus. Cette observation pourrait de plus se faire à distance (plusieurs kilomètres), et donc éviterait de perturber les activités des individus.
D'autre part, dans le cadre de l'étude du répertoire acoustique des groupes de dauphins, il est intéressant de connaître les périodes d'intenses activités sonores pour optimiser la période d'enregistrement et les objectifs de travail (enregistrement de click, de cris et de sifflement). L'histogramme ci-dessous
Figure 3 : Moyennes d'activités vocales en minute, en relation avec l'heure journalière. Echantillonné à partir de 5 grands dauphin de l'Atlantique (Tursiops truncatus truncatus). Issu de b. a. powell, Bull. South. Calif. Acad. Sci., 237-244. |
Bien que l'on ne puisse attribuer exactement le même comportement acoustique à la population de dauphin des côtes normandes (échantillonnage sur seulement 5 dauphins), il apparaît que le grand dauphin est un animal à l'activité acoustique intense et soutenue tout le long de la journée. Cela peut notamment être lié avec une activité sociale intense dans les troupeaux.
La population de dauphin du Cotentin se subdivise en petit groupe et chacun de ces groupes semble être capable de se déplacer sur de longue distance dans la journée ou sur plusieurs jours. Cette situation pose des problèmes pour les observateurs et il particulièrement difficile de connaître le parcours des groupes dans la journée, d'identifier ces groupes, de déterminer leur activité. Finalement on dispose de peu de données pour déterminer la manière dont les dauphins utilisent leur territoire.
Dans le chapitre I, on a vu que le son se propageait mieux dans l'eau, il serait donc intéressant d'utiliser cette propriété pour repérer les groupe de dauphins éloignés ou tout simplement pour vérifier si des dauphins sont présents. Il s'agirait en fait de faire une veille acoustique (écoute passive) à partir de point précis sur la côte ou en mer. De plus le bruit ambiant et les activités humaines en mer ne sont pas en mesure de gêner ce type de travail (chapitre III).
Enfin l'identification des groupes pourrait se baser sur la signature acoustique des individus ; à partir des cris ou des sifflements. Les résultats des enregistrements nous encouragent dans cette voie, étant donné la diversité des sons et la netteté des enregistrements. Cependant pour avoir accès à ce niveau d'analyse des émissions il serait important de définir précisément les caractéristiques des signaux (méthode standardisée) et d'utiliser un logiciel de traitement du son offrant plus de possibilités d'analyse (analyse amplitude-temps par exemple).
Dans ce domaine la plupart des études sont menées sur les Mysticètes (Richardson et al. 1995), tandis que très peu abordent le problème chez les petits odontocètes. On trouve tout de même des études menées par Perryman (1982), Kruse (1991), Janik (1996) [6], qui rapportent essentiellement des réactions à courts termes : augmentation de la vitesse, comportement de fuite et changement dans le comportement de plongée. Ces perturbations modifient tout au plus l'activité en cours de l'animal, mais on dispose de peu d'informations sur le long terme, c'est-à-dire les problèmes sociaux, spatiaux et de mortalités engendrées par un trafic permanent et de proximité (THOMPSON 1992).
Dans toutes les études citées ci-dessus la nature des perturbations n'est pas identifiée. On peut se demander si les animaux sont dérangés par la présence du bateau ou s'ils sont dérangés par le bruit provoqué, qui perturberait par exemple leurs communications.
Une étude menée en Ecosse montre que le "whale watching " est une source de perturbation, plus significative que les trafics commerciaux qui généralement croisent les dauphins de loin. Il est donc possible de se demander si la navigation rapprochée des bateaux d'observations n'exerce pas une tension acoustique sur les dauphins.
La structure de la population de dauphin du Cotentin et la manière dont elle semble occuper l'espace maritime, permettrait une analyse des perturbations du trafic sur l'acoustique. On évaluerait de manière comparative l'intensité globale des communications en condition non stressante et en conditions de stress (présence rapprochée d'un bateau d'observation ou d'un bateau de pêche).
CONCLUSION
Les écoutes passives et les enregistrements réaliser sur différent groupe de dauphin du Cotentin confirment qu'ils ne sont pas silencieux. Le répertoire sonore des dauphins étudiés pioche dans les principales catégories de sons identifiés parmi les dauphins du monde entier, c'est-à-dire que l'on a isolé des sons pulsés (click et cris) et un vaste répertoire de sifflements. Comme ces animaux couvrent la majorité des sons analysés dans d'autre mer et océan, une étude acoustique sur les dauphins du Cotentin se justifie largement. Les données récoltées pourront de cette manière être comparées à celles d'autres populations.
Les signaux analysés sont surtout des sifflements, même si des clicks et des cris pulsés ont été isolés. En tout, 10 sifflements sont détaillés, leur durée varie de 0.4 à 1.4 secondes. En moyenne la bande de fréquence de ces signaux se situe entre 7 kHz et 16 kHz avec quelques signaux atteignant plus de 18 kHz. Plusieurs signaux ne sont pas analysés et répertoriés du fait de leur rareté dans les enregistrements.
Les cris enregistrés sont typiquement d'une durée de 500 ms et leur structure fréquentielle est étonnamment régulière. Enfin des clicks d'écholocation ont été échantillonnés durant les activités de chasse, mais notre matériel d'analyse ne permettait pas d'étudier leurs caractéristiques précises. Toutefois on a pu isoler des clicks de cohésion, caractérisés par leur régularité et un intervalle de temps de 50 à 70ms.
La plus grande partie de la campagne d'enregistrement s'est faite dans la baie de St Vaast, où les conditions de navigation sont assez favorable. De ce fait le travail était assez facile. Toutefois d'autres groupes occupent la côte ouest, directement exposée aux perturbations atmosphériques, dans ces conditions le nombre de jours navigable diminue et les conditions de travail peuvent être perturbées par une houle importante.
Au-delà des conditions climatiques, le territoire occupé par les dauphins offre de nombreuses conditions favorables au travail acoustique. Les techniques de pêche et le nombre de bateau ne constitue une perturbation pour l'approche des animaux et le bruit engendré par ces activités est très faible, inférieur en général à 4 kHz. Une autre source de perturbation sonore peut venir des côtes au travers des activités portuaires et industrielles. Les écoutes passives dans différents sites n'ont pas montrer un bruit significatif engendré pas ces activités côtières. Les conditions d'enregistrement sont donc optimales et assurent un bruit de fond qui est en général négligeable.
En ce qui concerne le matériel d'enregistrement, il s'est révélé être d'une excellente qualité, on pourra toutefois reprocher au NAGRA un certain manque d'ergonomie du fait de l'utilisation de bandes analogiques, qui posent des problèmes de manipulation en mer, des problèmes de stockage lié à la faible capacité des bandes et un soucis avec la fragilité de celles-ci. Mais les qualités d'enregistrement et la possibilité de faire des écoutes passives sont des atouts non négligeables. Le logiciel de traitement du son srbta, est assez facile d'utilisation et donne accès à de nombreuses informations qualitatives sur les sons, suffisantes pour une analyse détaillée et pour la classification des signaux.
Finalement l'approche acoustique dans l'étude des populations de dauphin du Cotentin est tout à fait réalisable. Plusieurs voies de travail sont envisageables, aussi bien dans le cadre d'une étude approfondie des communications sonores que dans une optique d'aide au suivi et à la gestion des populations, notamment par le repérage et l'identification des groupes par une signature acoustique. Ces populations constituent un fabuleux terrain d'étude pour le bioacousticien ; l'excellent rapport qui existe entre les dauphins et les pêcheurs est une opportunité non négligeable dont il faut profiter, surtout lorsque l'on connaît les situations dramatiques dans d'autres régions. De plus la présence des pêcheurs est atout supplémentaire pour réaliser un suivi global de tous les groupes au même moments. Enfin le dernier avantage réside dans l'absence des sociétés de Whale whatching, ce qui permet d'observer les animaux dans un comportement non stressé.
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Index des Photographies et des Schémas
Photo 1 : Larynx de Tursiops truncatus.
(Photo Les baleines de l'atlantique Nord – Biologie & Ecologie, fontaine PH.)Photo 2 : Vue aérienne du port de Saint-Vaast-La-Hougue et des parcs.
(Photo Routier JB.)Photo 3 : Vue aérienne du port de Saint-Vaast-La-Hougue et des parcs. (Photo Routier JB)
Photo 4 : NAGRA IV
Photo 5 : Ensemble du matériel acoustique. (
Photo Routier JB)Schéma 1 : Spectre sonore.
Schéma 2 : Profil gauche et vue inférieure du crâne de Tursiops sans la mandibule.
Figure 1 : Un exemple de variation de la vitesse du son en fonction de la profondeur dans l'atlantique.
Figure 2 : Absorption de l’énergie acoustique à différentes fréquences dans de l'eau de mer.
Figure 3 : Moyennes d'activités vocales en minute, en relation avec l'heure journalière.
Carte 1 & 2 : Situation géographique de la zone d'étude.
Annexes
Sommaire des Annexes
Annexe n°1 : Inventaire des émissions sonores caractéristiques de certaines espèces d’Odontocètes.
Annexe n°2 : Liste des espèces d'odontocètes connues ou suspectées de ne pas émettre de sifflement.
Annexe n°3 : Caractéristiques Techniques du Nagra IV.
Annexe n°4 : Planche des sons identifiés.
Annexe n°5 : Planche des sons non identifiés.
Annexe n° 1
Inventaire des émissions sonores caractéristiques de certaines espèces d'Odontocètes
.
Espèces |
Type de son |
Gamme de fréquence (kHz) |
Maximum d'énergies (kHz) |
Durée du signal |
Références |
Delphinus delphis |
Click |
4-9 |
Busnel & Dziedic, 1976 |
||
Whistle |
4-16 |
||||
Click |
0.2-150 |
30-60 |
Gurevich, Evans, 1973 |
||
Inia geoffrensis |
Click |
25-200 |
100 |
Norris et al., 1972 |
|
Click |
65 msec |
Fish et al., 1976 |
|||
Lagenorhyncus obliquidens |
Click |
0.06-80 |
0.25-1 msec |
Evans, 1973 |
|
Whistle |
1-12 |
200-1200 msec |
M. Caldwell & Caldwell, 1971 |
||
Orcinus orca |
Click |
0.25-0.5 |
10-25 msec |
Schevill & Watkins, 1966 |
|
Scream |
2 |
||||
Click |
25 |
0.1-30 |
0.5-1.5 msec |
Diercks et al., 1971 |
|
Click |
A 35 |
12 |
0.1-0.5 msec |
Diercks , 1972 |
|
Phocoena phocoena |
Pulse |
41 |
2 |
0.5-5 msec |
Schevill et al., 1969 |
Pulse |
< 100-160 |
110-150 |
0.1 msec |
MÝ hl & Andersen, 1973 |
|
Steno bredanensis |
Click |
0.1-200 |
50-250 µsec |
Norris, 1969 |
|
Whistle |
3-10 2-14 |
100-900 msec |
Evans, 1967 |
||
Tursiops truncatus |
Click |
120-130 |
35-45 µsec |
Au et al., 1974 |
|
Click |
> octave |
35 |
Diercks et al., 1971 |
||
Click |
0.2-150 |
30-60 |
Evans, 1973 |
||
Click |
0.1-> 30 |
1-10 msec |
|||
Bark |
0.2-16 |
100 msec |
Evans & Prescott, 1962 |
||
Whistle |
4-20 |
100-3600 msec |
|||
Whistle |
2-20 |
800-900 msec |
M. Caldwell & Caldwell, 1967 |
||
Stenella attenuata |
Pulse |
A 120 |
0.075-0.2 msec |
Diercks, 1972 |
|
Whistle |
Evans, 1967 |
Annexe n°2
Liste des espèces d'odontocètes connues ou suspectées de ne pas émettre de sifflement.
Famille / espèce |
Source |
Platanistidae (dauphins de rivière) Inia geoffrensis Physeteridae (cachalots) Physeter catodon Phocoenidae (marsouins) Phococoena phococeona Delphinidae (dauphins) Cephalorhyncus heavisidii Ziphiidae Mesoplondon densirostris |
Norris et al. (1972) Watkins (1977) Busnel & Dziedzic (1966) Watkins, Schevill & Best (1977) D. Caldwell & Caldwell (1971) |
Annexe n°3
Caractéristiques Techniques du Nagra IV
Source : données fabricant.
GENERAL
Overall dimensions | 13.2 x 9.6 x 4.5" |
Weight (with ordinary batteries and 5 inch reel/tape) | 15 lbs. |
Tape width | 1/4" |
Audio track width | 2 mm |
Central time code track width | 0.35 mm |
AUDIO RECORD AND PLAYBACK
Nominal recording level | 0 dB = 510 nWb/m |
Max peak recording level | + 4 dB |
Erase efficiency at max peak level | 83 dB (80 dB) |
Frequency response, recorded at -20 dB 15 ips from | 30 Hz to 20 kHz +/- 1 dB (+/- 2 dB) |
Cross talk between audio channels | 0 dB modulometer 1 kHz 70 dB (65 dB) 0 dB modulometer 10 kHz 60 dB (50 dB) |
Residual time code signal on audio tracks (2 mm) | |
referenced to max peak level | Below -88 dB |
TAPE TRANSPORT
Switchable tape speeds :
15 ips = 38.1 cm/s
7.5 ips = 19.05 cm/s
3.75 ips = 9.525 cm/s